Crédits photos : Prisma
Du 20 au 24 mars 2019, se déroulait la 2e édition du festival d’art et réalité virtuelle Recto VRso à Laval. Cet événement comportait une exposition officielle d’artistes internationaux : l’Art&VR Gallery. Retour sur les 15 œuvres présentées lors du festival Recto VRso 2019.
Le festival Recto VRso est dédié à l’art et à la réalité virtuelle et mixte. Conçue par l’artiste-chercheuse Judith Guez, son objectif est de créer des espaces et des échanges autours des nouvelles formes artistiques entre le réel et le virtuel, proposant ainsi différentes hybridations et émergences. Une quinzaine d’œuvres internationales sélectionnées lors d’un appel à projet étaient à l’honneur dans l’Art&VR Gallery officielle, lors de l’édition 2019 de Recto VRso. La thématique 2019 était “Illusion Réelle/Illusion virtuelle“.
La Thématique Recto VRso 2019
Quoi de mieux que la créatrice du festival elle-même pour présenter la thématique de l’édition 2019 de Recto VRso. Judith Guez nous conte et nous peint ces illusions réelles et virtuelles : “Les illusions, entre surprise et émerveillement, déstabilisent et amusent. Elles interrogent les perceptions de notre réalité quotidienne. Loin d’être des erreurs, elles peuvent renverser nos préconçus, et ouvrir des portes vers des prises de conscience que notre réalité pourrait être autre et multiple. Elles sont finalement de véritables vecteurs de connaissances qui nous permettent, par le plaisir qu’elles suscitent, de nous laisser emporter vers d’autres possibles. Si parmi les intentions du créateur se trouve l’envie de provoquer chez le spectateur ces interrogations, alors les illusions peuvent devenir un atout essentiel dans la création artistique.”
“Pour cette deuxième édition du festival Recto VRso – Laval Virtual, nous explorons ces effets de l’illusion, provoqués dans des mondes virtuels ou mixtes.“
“[Les mondes virtuels] peuvent être inspirés d’illusions que nous vivons dans le monde réel, mais peuvent aussi être propre au virtuel. C’est donc entre illusions réelles et illusions virtuelles, à travers immersion et interaction, que nous interrogeons de nouvelles formes artistiques qui peuvent remettre en question nos habitudes perceptives, et nous faire basculer dans une autre conception du monde.”
Des illusions virtuelles qui augmentent nos capacités réelles
Parmi les différentes œuvres présentes lors de Recto VRso 2019, on pouvait y retrouver certaines qui jouaient sur nos perceptions et actions habituelles. Par exemple LÉVITATION, réalisée par David Guez et Bastien Didier, qui est une installation de réalité virtuelle avec un casque et des capteurs d’ondes cérébrales. Elle est conçue pour modifier certaines capacités cognitives et sensorielles humaines et immerger le spectateur dans un espace virtuel. Dans cet environnement virtuel, il pourra pratiquer la lévitation d’un cube grâce à son activité neuronale.
Ou encore la Dernière Hypnose de Freud, conçue par Marie-Laure Cazin. C’est un film neuro-interactif en VR 360° où les émotions du spectateur sont captées et analysées par une captation d’onde cérébrale. En temps réel, l’expérience intérieure du spectateur modifie la bande sonore du film et certains effets visuels.
L’installation Real Virtuality, de Louis Cortes et Celia Betourne joue quant à elle avec la perception du spectateur. La première perception de la réalité est engendrée par l’immersion dans un environnement scanné réaliste d’une pièce. Elle est ensuite progressivement remise en question par sa propre altération. Au cours de sa détérioration, l’immersion révèle ses artifices et amène ainsi le spectateur à reconsidérer la nature de ce qu’il perçoit.
Alors que la plupart des images de calcul visent à obtenir l’illusion parfaite de la réalité, le projet Liquid Matters tente d’inverser cette persistance illusionniste. Il produit des images abstraites en noir et blanc à l’aide de ferrofluides (nanoparticules de matériau ferromagnétique en suspension dans un liquide porteur). Ici l’illusion n’est pas virtuelle, mais bien réelle.
L’histoire de l’art sublimée par la réalité virtuelle
D’autres œuvres touchent à l’histoire de l’art de la peinture, comme Shiver, née de l’envie de rendre un hommage VR à la supercherie des tableaux de Magritte. Une fois l’oreillette allumée, vous naviguerez à travers des illusions malicieuses et des chemins de découvertes que vous pensiez inexistants à l’origine.
Dans David&Goliath, grâce à sa gestuelle, le spectateur voyage dans plusieurs mondes aux influences symbolistes et surréalistes. En marchant, découvrant, touchant et dansant, il dialogue avec l’œuvre pour créer une nouvelle toile virtuelle où vertige et introspection se mélangent.
Toujours autour de la peinture, The Scream VR est un documentaire sensoriel qui donne vie aux pensées et aux démons de Munch. Cette expérience de réalité virtuelle utilise la toile The Scream comme rampe de lancement. Elle explore les obsessions les plus profondes du peintre dans une mise en scène audiovisuelle du plus célèbre cri de l’histoire de l’art.
Nous avons aussi souhaité ouvrir l’exposition Recto VRso 2019 à des œuvres n’utilisant pas que la technologie de la réalité virtuelle, mais qui en questionne les concepts : certains projets amenaient des réflexions en lien avec l’immersion, l’interaction et la présence. Tentacle Flora est une sculpture robotique inspirée d’une vision d’une colonie d’anémones de mer poussant sur le corail. Un actionneur en alliage à mémoire de forme est utilisé comme tentacules. Le haut de l’actionneur s’allume en imitant doucement un organisme bioluminescent à l’aide d’une DEL pleine couleur.
Des univers multiples qui s’intéressent à des médias culturels variés
La réalité virtuelle permet aux artistes d’interpréter toute sorte de médium, comme l’œuvre SENSVR qui s’inspire de la bande dessinée de Marc Antoine Matthieu. L’œuvre nous plonge – sans un mot – du voyage initiatique d’un homme. Le vagabond anonyme erre dans un univers à la fois dépouillé et labyrinthique. Tout autour de lui, des flèches aux formes changeantes en permanence lui montrent le chemin à suivre. Son aventure est une invitation à questionner l’inconnu et à lâcher prise des codes pour percevoir au-delà des limites… D’une page, d’un angle ou d’une invention de l’imagination.
Aussi, Pierre de Rêve montrait l’univers féérique et forain de Jean-Paul Favand, fondateur du Musée des Arts Forains de Paris. L’installation immersive permettait de rentrer dans une pierre de rêve à l’aide d’une vidéo projection stéréoscopique, de lunettes 3D et d’une baguette magique pour s’y déplacer. Le spectateur voit alors un paysage entre la grotte préhistorique et une chaîne de montagnes où les ombres dansaient.
L’artiste chercheur Cédric Plessiet exposait, quant à lui, Doubles autres, une série de tableaux interactifs. Elle présente une doublure numérique d’une personne existante à laquelle un comportement interactif s’associe afin de présenter un nouveau type de portrait. En plus de l’utilisation de la peinture comme outil descriptif, Cédric considère l’interaction pour présenter la perception unique de l’artiste face à son modèle.
Faire agir le spectateur dans la création de l’œuvre
Le projet PARALLELS de Sophie Daste et Eric Hao Nguy consiste en des écrans vidéo interactifs. Le parallèle est créé par l’interaction du spectateur sur l’écran tactile. Le spectateur joue avec la vidéo pour découvrir les zones d’une autre vidéo, combinant les deux visionnements en une seule image. A travers un cadre de film identique, les vidéos montrent l’assassin du jeu vidéo Assassin’s Creed dans un passé imaginaire. Il est montré en parallèle avec une vue des mêmes lieux filmés dans les villes modernes. Pendant l’expérience, le corps du spectateur remplace l’avatar.
Grande gagnante du Laval Virtual Award, catégorie Recto VRso, Margherita Bergamo présentait Eve dance is an unplaceable place. Le projet mélange danse et réalité virtuelle. Eve est une fille qui rend possible la rencontre entre le virtuel et le réel. Elle voyage entre les dimensions, donnant forme aux questions. Dans cette rencontre, un spectateur entre dans le corps d’Eve et se met à danser dans un monde virtuel. Pendant ce temps, l’artiste performe sa chorégraphie réelle face au public.
HanaHana 花華, mention spéciale de l’édition 2019, projette le spectateur dans un monde onirique virtuel. Incarné dans un essaim de molécules, le joueur est la force vitale dans un désert surréaliste. Il a le pouvoir de faire éclore des mains comme des fleurs et de participer à une œuvre collective. Dans cette œuvre, les virtualités se fondent avec l’inconscient pour un voyage déchirant dans les profondeurs de l’esprit, du corps et des sens.
Enfin, LOGIN étudie les multiples approches pour de nouveaux modes d’interaction et de collaboration. L’œuvre explore les domaines du virtuel, de l’augmenté et du réel. L’installation brise les frontières entre ces chemins technologiques et les fusionne dans une expérience. Celle-ci donne au destinataire une impression unique des technologies sous-jacentes.